Évolution des facteurs locaux de commercialité

Charles-Edouard BRAULT,
Avocat à la Cour

Il appartient au Juge de rechercher, au besoin d’office, si les modifications retenues au titre de l’évolution des facteurs locaux de commercialité présentent un intérêt pour l’acticité exercée dans les lieux loués par le preneur

Références : Cass. 3ème civ., 7 avril 2004, M. Paoli c/ SCI Locate et fils ( pourvoi en cassation c/ l’arrêt rendu le 18 mars 2002 par la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion).

 

Note : La modification matérielle ou notable des facteurs locaux de commercialité doit présenter une incidence et effective sur le commerce considéré, et cet intérêt s’apprécie de manière identique en révision comme en renouvellement du loyer.

Après avoir estimé que l’incidence pouvait s’apprécier au regard du commerce exercé de même qu’au regard de l’ensemble des activités contractuellement autorisées, la Cour de cassation a posé le principe que la notion de commerce considéré s’entendait exclusivement du commerce exercé par le preneur dans les lieux loués (Cass. 3e civ., 8 janv. 1997 : Loyers et copr. 1997, comm. 51 ; Cass. 3e civ., 31 mars 1998 : Loyers et copr. 1998, comm. 215 ; Cass. 3e civ., 16 juil. 1998 : Administrer nov. 1998, p. 32, note J.D. Barbier).

Dans le rapport de la Cour de cassation de l’année 1999, Madame Fossaert-Sabatier précise l’analyse de la Cour sur cette question : il s’agit d’un lien objectif de l’existence matérielle de l’impact économique sur le fonds exploité réellement dans les lieux loués. Il ne faut donc prendre en compte ni le mode de gestion ni les clauses « pluricommerces » avec l’éventail des activités autorisées. Les juges du fond reprennent cette analyse et la 16ème Chambre B de la Cour d’appel de Paris a rappelé que l’évolution des facteurs locaux n’était « pas nécessairement favorable au commerce considéré », soit tout commerce effectivement exercé (CA Paris, 16e B, 19 janv. 2001 : Loyers et copr. 2001, n° 66 ; CA Paris 16e B, 27 sept. 2002 : Administrer déc. 2002, p. 40).

En définitive, l’évolution invoquée pour obtenir le déplafonnement du loyer peut avoir une incidence sur la commercialité d’un emplacement, mais encore faut-il prendre en compte la nature des activités exercées effectivement par le preneur dans les lieux loués, même si celles-ci ne correspondent que pour partie à l’éventail des activités autorisées par la convention locative.

La Cour de cassation précise qu’il appartient au juge de rechercher, au besoin d’office, l’impact des modifications alléguées sur le commerce considéré.

Cette jurisprudence n’a pas été critiquée par le groupe de travail qui a remis ses propositions de modernisation à la fin du mois d’avril 2004. Elle aboutit cependant à permettre à un locataire bénéficiant d’un bail pluricommerces d’échapper au déplafonnement en choisissant d’exploiter une des activités autorisées alors qu’il pourrait faire évoluer ses activités selon l’évolution de la commercialité du secteur.